“avant demain”
Exposition à la Librairie du jour agnès b.
Dessins : AUTOPORTRAITS DESSINÉS LES YEUX FERMÉS
Photos Vidéo : MA SITUATION
“ L'œuvre poétique de Bruno Dunckel entremêle la notion de trace et d'empreinte à l'onirisme de la sauvegarde. Une sauvegarde hystérique qui tente de combler le vide. A travers ses trente photographies et autant de dessins, il parvient à recréer un univers personnel auquel toute notion d'horizontalité est mise à mal.
En effet, la série « Ma Situation » archive des espaces parcourus, des espaces dans lesquels il s'inscrit... Ces images figurent et attestent sa présence ; son absence par le cadrage et le manque de repères géographiques. Evocation de l'écoulement du temps et de l'effacement. Mais paradoxalement, de la création. Il est là. Il a été là, à cet endroit précis ; les coordonnées géographiques le confirment. L'artiste se situe pour ne pas perdre la trace mais nous trompe par son regard enfantin et amusé. Il nous défie. La ligne d'horizon dans un tableau délimite le « haut » et le « bas ». Les courants photographiques de la Nouvelle Vision cherchaient déjà à bouleverser ces présuppositions, dont le travail de László Moholy-Nagy en est un exemple probant. L'absence d'horizon dans ses photographies provoque notre perception et trouble le rapport du positionnement du spectateur. C'est dans cette lignée que vient s'ajouter le travail photographique de Bruno Dunckel.
« Se perdre, se souvenir. Se cacher, se rassurer. Ne voit-on bien que les yeux fermés ? Voir le temps qui passe, saisir un instant comme un photographe, un témoin, c’est pour cela que je trace une ligne sur du papier, je me dessine les yeux fermés pour voir. »
Chaque jour l'artiste utilise la feuille et le crayon afin de délimiter les traits de son visage. Les yeux fermés, ce ne sont que sa main et son esprit qui représentent son visage. L'entassement déjoue la vie et la mort. Cette série infinie d'autoportraits ajoutés à ses photographies composent une rythmique irrégulière mais rigoureuse. Dans la continuité de Roman Opalka, Bruno Dunckel propose lui aussi un projet inachevé, de toute une vie. Une quête non finie et accomplie. Cette démarche stimulante lui permet de se sentir vivant, toujours plus vivant. Mais voir ces portraits et photographies accumulés, n'est-ce pas l'affirmation ineffable d'un souvenir disparu ? Une réponse évidente au « ça-a-été » de Roland Barthes ?
Graphiste et monteur de formation, Bruno Dunckel exposera également deux vidéos qui feront écho aux pendants de l'exposition. La première présente une vue du carnet d'autoportraits feuilleté par l'artiste. La seconde illustre la série « Ma Situation ».
Texte de Marine Delnevo